vendredi 16 janvier 2015

Je ne suis pas (plus) Charlie

Je ne suis pas Charlie

Tuer au nom de Dieu est une aberration.
On ne peut pas faire la guerre au nom d’une religion.
Cette semaine la chose a été dite clairement par les plus hautes autorités religieuses du monde entier : On ne peut tuer ni au nom d’Allah, ni de Jéhovah ou de Jésus.

D’autre part la laïcité garantit la liberté de conscience, la liberté religieuse, celle de croire et de ne pas croire. En ce sens les lois laïques sont des lois de liberté et pas des lois d’interdiction.
Enfin la liberté d’expression garantit à chacun le droit de pouvoir dire ce qu’il pense.
Voilà une série de droits humains qui ont été rappelés cette semaine.
Mais peut-on insulter la foi des autres ?
Chacun a le droit de s’exprimer, mais est-il possible d’offenser, de provoquer, de moquer des millions de croyants ?
Si la liberté d’expression est un droit fondamental, ce droit a des limites qui sont celles de l’apologie du crime, du racisme, du terrorisme. Limites qui peuvent être aussi celles des insultes et de la provocation.

Or sur ce point de la liberté d’expression, notre pays est marqué par le deux poids deux mesures. On pense que le journal Charlie se moque de manière indistincte des chrétiens, des juifs ou des musulmans. Mais à y regarder de plus près cela n’est pas tout à fait vrai. Par exemple aujourd’hui, et c’est heureux, il n’est pas possible de montrer des juifs sous la forme d’un roublard ou d’un usurier avec des franges rituelles. Aujourd’hui, et c’est heureux il n’est pas possible de montrer des juifs dominant le monde avec leur argent.

Serait il possible aujourd’hui d’écrire et de publier le livre d’Edouard Drumont La France juive, qui connut un très grand succès médiatique et éditorial au début du XXe siècle ? Non bien entendu et c’est tant mieux. Car toutes ces publications et caricatures antijuives ont provoqué dans notre pays une haine antisémite qui s’est soldée quelques décennies plus tard par la Shoah.
Mais aujourd’hui il est possible de publier des caricatures antimusulmanes, il est possible à Michel Houellebecq de publier son dernier livre Soumission, qui dit la même chose que Drumont en 1885, sauf que là il s’agit des Musulmans et plus des Juifs. Il est possible que Houellebecq s’exprime dans tous les médias quelques heures avant les attentats contre Charlie pour dire ses insanités.

Voilà ce qui est insupportable, voilà ce qu’il faut absolument dénoncer. Voilà ce qui ruine actuellement notre pays. Comment voulez-vous dans ce cas que des millions de Français musulmans ne se sentent pas attaqués depuis des années en France ?
Voilà en premier ce qui fait le terreau de la radicalité musulmane dans notre pays.
Les recruteurs en provenance du Moyen orient, venant d’Arabie Saoudite, du Qatar, inspiré par le Wahhabisme et le Salafisme radical, ont beau jeu ensuite de dire à une partie de notre jeunesse en difficulté : Voyez, ce pays, la France, ne vous aime pas ! Allez combattre.
Ne pas voir cela c’est être aveugle.
Il ne faut jamais oublier que les générations d’avant n’ont pas pu et n’ont pas su empêcher les crimes antisémites. Les grands médias de l’époque ont même été parties prenantes de ces crimes.
Aujourd’hui, nous sommes face à nos responsabilités. Serons-nous capable de réfléchir ensemble et de combattre contre ce qui se prépare : la guerre contre une partie de notre peuple qui habite les quartiers pauvres de notre pays.
Aujourd’hui s’il s’agit d’une guerre, celle-ci doit être menée en priorité contre la misère, contre l’exclusion et la ghettoïsation, contre les préjugés, contre l’injustice, contre la pauvreté, contre l’abandon de pans entiers de notre société. La situation dans laquelle on laisse des milliers de jeunes risque d’en conduire une bonne partie vers la pire des radicalités.
Or cette semaine, il semble que les seules mesures que notre gouvernement soit capable de prendre à leur encontre, sont des mesures de répression.


François Baudin

2 commentaires:

  1. Du « jesuischarlisme » et de ses mystères...

    Depuis janvier 2015, quelques cerveaux sont entrés en ébullition, et le Premier Ministre lui-même a participé à des polémiques dont il aurait dû se garder : soit il croise le fer avec des philosophes trop élevés, et le duel est un peu ridicule – l'épée de l'un est trop basse par rapport à celle de l'autre, – soit il affronte un sociologue aux théories fumeuses, et les coups portent dans le vide.
    Un disciple de Durkheim a trouvé lumineuse l'explication des grandes manifestations de janvier par sa théorie du zombie. Pourquoi pas ? Je reste cependant sceptique à l'égard de ce concept ; n'étant pas sociologue, je vais laisser les spécialistes trancher de cette question. Ayant participé aux défilés avec ma petite pancarte « Je suis Charlie », je me sens personnellement concerné par quelques uns des critères établis par ce spécialiste des morts-vivants mais j'ai des doutes sur les conclusions qu'il tire de ses sophismes.
    La question centrale, ici, est de (re)définir notre bien commun spécifiquement franco-français : la laïcité. Le sujet mérite des analyses ardues et « pointues » que l'on pourrait simplifier en choisissant un angle concret et facile à traiter : les jours fériés ! Supposons que toutes les religions monothéistes aient droit au même quota de célébrations de fêtes « carillonnées », supposons aussi que les athées et les libres penseurs aient droit pareillement à des congés justifiés par leurs convictions. Alors seraient affectés aux chrétiens (toutes confessions confondues) des jours de fêtes aussi nombreux que pour les Juifs, les Musulmans et les non-croyants.
    Je rêve pour ceux-ci d'un 14 juillet célébrant à nouveau le culte de la déesse Raison ; le 11 novembre pourrait devenir le jour de la Paix ; le 1er mai celui de la Justice sociale ; le 8 mai celui du refus des génocides et le 4 août on célèbrerait l'abolition des privilèges ! Pour les chrétiens, quatre jours fériés – en dehors des dimanches, – pas un de plus (25 décembre, lundi de Pâques, 31 octobre pour la fête de la Réformation et le 2 novembre pour les morts) ; pour les Juifs : Yom Kippour, Hanouka... ; enfin les Musulmans auraient droit à leurs quatre jours (Aïd al-Fitr et trois autres).
    Chaque Français se sentirait respecté et la paix civile pourrait s'installer, pour autant que personne n'attente aux convictions des autres par des invectives ou des marques ostensibles d'intégrisme (religieux ou laïc) : ni voile intégral, proscrit en tous lieux du territoire, ni processions catholiques, etc. On pourrait ainsi apprendre la Tolérance avec plaisir. Et peut-être même que la sérénité retrouvée apaiserait les débats d'idées ?

    Georges Hoen – candide optimiste de Taintrux (Vosges)

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  2. Merci pour votre commentaire. Vous pouvez lire sur ce Blog, la conférence qui s'intitule Islam et laïcité, elle renverse quelques idées toutes faites sur l'Islam et sur la laïcité.
    François Baudin

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